jeudi 3 décembre 2009


André Poulin 2005 ©

Collusion et dissimulation au Royaume de Sa Majesté
Les dessous des relations entre les paramilitaires protestants et les forces de l’ordre en Irlande du Nord : l’assassinat de Patrick Finucane


Comme en témoignent les dernières crises survenues en Irlande du Nord depuis quelques mois, la paix demeure fragile dans cette région. En effet, le processus de démilitarisation des différents groupes paramilitaires bat de l’aile et l’application de l’Accord du Vendredi-Saint est une fois de plus suspendue pour une période indéfinie. Cependant, la normalisation de la société nord-irlandaise ne pourra se faire uniquement par la reprise du dialogue politique entre les deux communautés et le dépôt définitif des armes. Une paix définitive et durable entre catholiques et protestants ne sera possible tant et aussi longtemps que toute la lumière ne sera faite sur certains sujets controversés. Parmi ceux-ci, se trouve la question de la collusion entre les forces de l’ordre britanniques et les paramilitaires protestants dans leur lutte contre le mouvement républicain.


Les allégations de collusion entre les forces de l’ordre britanniques et les paramilitaires protestants ne sont pas nouvelles.  Elles ont toujours fait partie du conflit et sont devenues au cours des années une arme puissance de la propagande républicaine.  En effet, les Républicains ont toujours affirmé que les forces de l’ordre britanniques ont formé et armé les paramilitaires protestants afin de les utiliser comme « escadrons de la mort » dans le but d’éliminer les républicains actifs dans les différents mouvements paramilitaires nationalistes ou ceux soupçonnés d’y appartenir.  Ces allégations ne font toutefois pas l’unanimité parmi les spécialistes de la question d’Irlande et sont souvent reçues avec scepticisme de leur part.  La majorité des spécialistes sont bien conscients qu’il serait naïf de croire qu’il n’y ait jamais eu de collusion durant ce conflit.  D’ailleurs, comment peut-il en être autrement? Les forces de l’ordre et les paramilitaires protestants ne combattent-ils pas le même ennemi!  De plus, certains paramilitaires protestants, qui furent condamnés à des peines de prisons pour participation à des actes terroristes, étaient aussi membres des forces de l’ordre.  Cependant, ces mêmes spécialistes refusent pour la plupart de donner raison aux allégations républicaines voulant que cette collusion ait été orchestrée aux plus hauts échelons du gouvernement britannique[1].  Ils préfèrent plutôt s’en tenir à l’explication officielle, celle de la présence de « pommes pourries » parmi les forces de l’ordre.  L’assassinat de Patrick Finucane, avocat et défenseur des droits de l’homme, semble toutefois vouloir donner raison aux allégations nationalistes.

Cet assassinat, qui est sans contredit l’un des crimes les plus controversés de ce conflit, est au cœur d’une lutte vieille de quinze ans qui oppose la veuve de Patrick Finucane et ses enfants au gouvernement britannique.  La famille Finucane se bat depuis ce temps pour que soit tenue une enquête publique et indépendante afin de faire la lumière sur ce meurtre.  Au cours de sa longue bataille, la famille Finucane a reçu des appuis de taille venant entre autres de l’ONU, du Congrès américain, du gouvernement irlandais, du Parlement européen et d’Amnistie Internationale[2].  Le 1er juillet 2003, la Cour Européenne des Droits de l’Homme donna même raison à Geraldine Finucane, la veuve de Patrick Finucane, dans la cause qui l’opposait au Royaume-Uni.  Dans son jugement, la Cour a reconnu le gouvernement du Royaume-Uni coupable de violation de l’article 2 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme qui stipule que « le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi ».  Selon cette cour, le gouvernement britannique n’aurait pas tout fait en son pouvoir pour empêcher l’assassinat de Patrick Finucane, alors qu’il savait que la vie de l’avocat était en danger[3].

Malgré la campagne menée par la famille Finucane et les demandes répétées des nombreux organismes indépendants pour la tenue d’une enquête publique, le gouvernement britannique a toujours refusé de donner suite à celles-ci, considérant avoir fait le nécessaire dans ce dossier.  Il est vrai, deux commissions d’enquête sur les allégations de collusion ont été instaurées.  Cependant, ces enquêtes ont vu le jour uniquement parce que le gouvernement se trouvait dans une situation des plus gênantes.  En 1989, confronté à des révélations troublantes voulant que l’assassinat d’un membre présumé de l’IRA fut le résultat direct d’un coulage de renseignements secrets par les forces de l’ordre à des paramilitaires protestants, le gouvernement britannique fut forcé de mettre sur pied une commission d’enquête (la Commission Stevens) afin de faire la lumière sur cette affaire.  En dépit du manque flagrant de coopération de la part des forces de l’ordre, la Commission d’enquête Stevens déposera trois rapports, qui confirment tous l’existence de la collusion[4].  Toutefois, les conclusions de cette commission seront jugées insatisfaisantes, puisque l’essentiel du contenu des rapports restera confidentiel, pour des « raisons de sécurité d’état », et seuls de brefs résumés seront accessibles au public.  D’ailleurs nous savons aujourd’hui que les membres de l’enquête Stevens connaissent l’identité des tueurs de Patrick Finucane depuis au moins 1995, si ce n’est avant.  Pourtant aucun suspect ne fut traduit devant les tribunaux relativement à cette affaire[5].

La deuxième commission d’enquête fut établie afin de relancer le processus de paix et d’éviter l’échec de la réforme de la police en Irlande du Nord.  Dans le but de réduire les tensions entre catholiques et protestants, le gouvernement de Tony Blair mit sur pied une nouvelle commission d’enquête en 2001 pour faire la lumière sur les allégations de collusion dans les cas précis de six assassinats de catholiques et de protestants, dont celui de Patrick Finucane.  Peter Cory, juge à la retrait de la Cour Suprême du Canada, fut nommé à la tête de cette nouvelle commission d’enquête.  Sa tâche était de déterminer s’il y avait lieu de tenir des enquêtes publiques concernant ces six dossiers.  Le juge Cory conclut que dans quatre des six cas, dont celui de Patrick Finucane, le tenue d’une enquête publique était nécessaire[6].  Placé dans l’embarras, le gouvernement britannique déclara qu’il était impossible pour le moment de tenir une enquête publique, étant donné qu’un suspect venait d’être arrêté dans le dossier Finucane.  L’enquête, affirmait-on, pourrait nuire au processus judiciaire en cours.  Mais voilà, le 13 septembre 2004, Ken Barrett, ancien paramilitaire protestant, membre de l’UFF (Ulster Freedom Figthers), devenu agent secret pour le compte de sa Majesté, est condamné à une peine minimum de 22 ans de prison pour le meurtre de Patrick Finucane.  Selon les termes de l’Accord du Vendredi-Saint, il bénéficiera toutefois d’une peine réduite et pourra recouvrer la liberté après seulement quelques mois de détention[7].

N’ayant plus de motifs valables pour retarder la tenue d’une enquête publique, le gouvernement Blair dut se résigner à en annoncer la mise sur pied le 23 septembre 2004.  Le lendemain, toutefois, Paul Murphy, Secrétaire d’état responsable de l’Irlande du Nord, déclara qu’une grande partie de cette enquête devrait être menée derrière des portes closes en raison des questions de sécurité nationale qui y seront abordées.  Il ajouta que le gouvernement s’apprêtait à revoir la loi concernant les enquêtes publiques, et que cette nouvelle loi s’appliquerait à l’enquête publique annoncée sur le meurtre de Patrick Finucane[8].  Cette déclaration provoqua la colère de la famille Finucane et de tous les groupes militant pour la tenue d’une enquête publique et indépendante.  Tous sont convaincus que le gouvernement britannique cherche encore une fois à étouffer le scandale de la collusion[9].  Pour Géraldine Finucane et ses enfants justice ne pourra être rendue tant et aussi longtemps que ceux qui ont permis et commandé l’assassinat de son mari et de leur père ne soient traduits en justice.  Seule une enquête publique et indépendante permettra d’y arriver.  Pour cette raison, la famille Finucane a clairement indiqué lors d’une rencontre avec le Premier ministre Tony Blair qu’elle ne participerait pas à la nouvelle enquête proposée par le gouvernement si celle-ci n’est pas entièrement publique[10].  Le 26 novembre dernier, après avoir pris connaissance du nouveau projet de loi sur les enquêtes publiques, les membres de la famille Finucane confirmèrent qu’ils ne participeraient pas à cette enquête[11].  Michael Finucane, dans une lettre publiée dans le quotidien The Guardian, accusa Tony Blair d’avoir manqué à la promesse faite à sa famille[12]. De son côté, Geraldine Finucane lança un appel à tous les membres de la magistrature anglaise, galloise et écossaise leur damandant de ne pas participer à une commission d’enquête établie en vertu de la nouvelle loi[13], après que le juge Cory, lui-même, ait affirmé qu’aucun juge canadien qui se respecte ne pouvait y sièger[14].  Amnistie Internationale donna son appui à l’appel lancé par Géraldine Finucane. 

La détermination de la famille Finucane repose sur une ferme conviction : Patrick Finucane a été assassiné parce que les forces de l’ordre l’ont voulu.  Mais justement pour quelles raisons les Finucane sont-ils convaincus que les forces de l’ordre ont joué un rôle déterminant dans cet assassinat.  C’est ce que nous allons voir.

Rappelons les faits.  Le 12 février 1989, vers 19 h 25, deux hommes masqués entrent de force dans la résidence des Finucane, dans un quartier nord de Belfast, et abattent froidement l’avocat devant sa femme et ses trois enfants.  L’autopsie révélera qu’il fut atteint de 14 projectiles, dont un tiré à bout portant alors qu’il gisait sur le sol.  Au cours de l’attaque, sa femme, Geraldine, fut blessée au pied par une balle perdue.  Le lendemain de l’attentat, un groupe paramilitaire protestant, UFF (Ulster Freedom Fighters), nom de guerre de l’UDA (Ulster Defence Association) revendiqua l’assassinat.  Selon le communiqué de l’UFF, Pat Finucane fut éliminé parce qu’il était un membre important de l’IRA.  La famille Finucane avait effectivement des liens étroits avec le mouvement républicain.  Deux frères de Pat Finucane ont fait de la prison pour leur participation active dans le mouvement républicain, et un troisième est mort en 1972 dans un accident de voiture, alors qu’il était en service commandé pour l’IRA[15].  Cependant, les allégations voulant que Pat Finucane, lui-même, ait été membre de l’IRA furent niées par la famille et les amis du défunt, et même que la RUC (Royal Ulster Constabullary), la police de l’Irlande du Nord, dut le reconnaître dans un communiqué de presse[16].  Pat Finucane était par contre une source d’irritation constante pour les forces de l’ordre.  À plusieurs reprises, il avait défendu des membres de l’IRA avec succès et mis à jour certaines pratiques illégales de la police.  En permettant à des individus soupçonnés d’avoir perpétré des actes terroristes de recouvrer leur liberté, Pat Finucane était considéré comme un « terroriste en habit » par ceux qui les combattaient[17]

Dès le lendemain de l’assassinat, la famille Finucane dénonçait l’implication des forces de l’ordre dans cet acte terroriste.  Il faut dire que Patrick Finucane était dans la mire des forces de l’ordre depuis un certain temps.  Il avait déjà reçu des menaces de mort de la part d’agents de la RUC par l’entremise des ses clients, comme le révéla un de ceux-ci, Brian Gillen, à un journaliste de la BBC.  Lors d’un interrogatoire, un policier lui aurait dit que son avocat n’était pas mieux que lui et qu’il serait éliminé[18].  Trois semaines avant le meurtre de Patrick Finucane, un ministre du gouvernement britannique, Douglas Hogg, profitant l’immunité parlementaire, déclara à la chambre des Communes qu’il avait le regret d’affirmer, mais cela était un fait avéré, qu’en Irlande du Nord certains avocats étaient des sympathisants à la cause de l’IRA[19].  Répondant à ceux qui jugeaient que ses propos étaient dangereux pour la vie de certains avocats irlandais, le ministre se contenta de dire qu’il tenait ses renseignements « de gens qui s’occupaient de ces questions » et qu’il ne ferait aucun autre commentaire à ce sujet[20].

Quelques jours après l’assassinat, le frère de Patrick Finucane, Martin, apprit, et en informa les médias, que le jour de la mort de son frère, les barrages policiers établis à proximité de la résidence des Finucane avaient été levés une heure avant le meurtre[21].  Quelques mois après l’assassinat, un des fusils utilisés lors du crime sera récupéré à la suite d’une rafle policière.  L’analyse balistique révélera que ce fusil était l’une des armes volées dans un dépôt militaire en août 1987 par un membre de l’UDR (Ulster Defence Regiment) et vendues à des paramilitaires protestants.  Ce qui adviendra par la suite de cette pièce à conviction essentielle est pour le moins troublant.  En 1995, elle sera remise à l’armée, qui en profitera pour changer certaines pièces, dont le canon, détruisant ainsi la pièce à conviction[22].

Mais ce qui demeure le plus troublant, ce sont sans aucun doute les révélations faites par trois paramilitaires protestants, Brian Nelson, William Stobie et Ken Barrett, tous ayant travaillé à différents moments comme agents secrets de sa Majesté.  Leur rôle dans l’assassinat de Patrick Finucane fut déterminant.  Brian Nelson a fourni les renseignements concernant Patrick Finucane aux meurtriers.  William Stobie leur a procuré les armes.  Ken Barrett a appuyé sur la détente.  Le second assassin ne sera jamais publiquement identifié.  Mais, il est clair que la police en connaît l’identité.

De ces trois individus, Brian Nelson est sans contredit le personnage le plus controversé.  Pour les républicains, son nom est synonyme de collusion.  Pour les services secrets britanniques, il était leur arme la plus précieuse parmi les paramilitaires protestants.  Natif de Belfast, il fera un bref séjour dans l’armée britannique à la fin des années soixante.  Au début des années 1970, après avoir quitté le Régiment des Black Watch, il deviendra membre de l’UDA.  En 1973, avec deux acolytes il sera condamné à 7 ans de prison pour l’enlèvement de Gerald Higgins, un catholique partiellement aveugle.  Au cours de la séquestration, les trois membres de l’UDA torturèrent leur prisonnier à l’aide d’un dispositif électrique.  Gerald Higgins, qui souffrait de problèmes cardiaques, décéda quelques temps après sa libération.  Certaines sources affirment qu’à cette époque Nelson travaillait déjà pour les services secrets britanniques, ce qui expliquerait la clémence de la sentence qui lui fut imposée et le fait qu’il ne fut jamais poursuivi pour tentative de meurtre dans cette affaire[23].  À sa sortie de prison, Nelson reprit ses services au sein de l’UDA et pour le compte des services secrets.  Au milieu des années 1980, il quitta l’Irlande du Nord pour aller travailler en Allemagne de l’Ouest. 

À cette même période, le gouvernement britannique semblait incapable d’infliger des revers aux républicains.  Quelques mois avant son élection, Margaret Thatcher perdit un de ces principaux collaborateurs, Airey Neave, lors d’un attentat à la voiture piégée orchestré par l’INLA (Irish National Liberation Army).  Neave, un homme de la nouvelle droite conservatrice et un des principaux responsables de l’avènement de Thatcher à la tête du Parti conservateur, était un partisan de la ligne dure à l’endroit des républicains[24].  Quelques mois seulement après l’entrée au pouvoir de Thatcher, l’IRA réalisa son fait d’armes le plus important du conflit.  Dans la journée du 27 août 1979, deux attendats allaient coûter la vie à Lord Mountbatten, cousin de la reine, et à dix-huit soldats britanniques.  Deux ans plus tard, l’attitude intransigeante de Margaret Thatcher à l’égard des grévistes de la faim s’avéra un échec total pour le gouvernement britannique.  La mort de dix grévistes entraîna une croissance fulgurante des appuis aux républicains.  Les républicains allaient marquer un autre coup d’éclat trois ans plus tard.  Au cours de la nuit du 12 octobre 1984, lors de la conférence annuelle du Parti conservateur à Brighton, l’hôtel qui hébergeait les membres du parti fut soufflé par une explosion, tuant cinq personnes et en blessant plusieurs.  Margaret Thatcher et son mari s’en sortirent miraculeusement indemnes.  L’IRA revendiquera l’attentat en ces termes :  « Aujourd’hui nous avons été malchanceux, mais n’oubliez pas, nous n’avons à être chanceux qu’une fois, vous, vous devez l’être toutes les fois »[25].  L’attentat provoqua une grave crise parmi les services secrets britanniques et plusieurs souhaitaient des représailles.  Tous se demandaient comment les services secrets n’avaient pu prévenir l’attentat et comment éviter qu’un autre attentat de cette nature se reproduise.  Même Margaret Thatcher voulait voir des résultats.  Elle exigeait aux services secrets britanniques (MI5) de la tenir personnellement au courant de tout nouveau développement de la situation en Irlande du Nord[26].

C’est dans ce contexte que Nelson allait jouer un rôle déterminant.  Au cours de l’année 1987, les services secrets le convainquirent de retourner en Irlande du Nord afin de poursuivre son travail d’infiltration au sein de l’UDA.  À son retour, Nelson, devenu agent 6137, travaillait désormais pour la FRU (Force Research Unit), l’unité la plus secrète des services de renseignements de l’armée.  Cette unité avait comme mission de recruter parmi les républicains et les loyalistes des agents doubles et de les diriger.  À cette époque, les différents groupes paramilitaires protestants s’étaient lancés dans une campagne d’assassinats sectaires qui visait tous les catholiques, peu importe qu’ils soient ou non actifs dans les différents mouvements républicains.  L’armée voulait mettre fin à l’assassinat de civils innocents et rendre les paramilitaires protestants « plus professionnels », c’est-à-dire s’attaquer uniquement à des « cibles légitimes »[27].  Brian Nelson devait leur permettre d’atteindre cet objectif, malgré plusieurs bavures[28].

À son retour d’Allemagne, Nelson devint responsable des services de renseignements de l’UDA.  À ce titre, il devait mettre à jour les renseignements accumulés au fil des ans par l’UDA, trouver les méthodes et les moyens de réaliser les assassinats, sélectionner les cibles et fournir aux tueurs tous les renseignements concernant la victime utiles à la réalisation de l’assassinat.  Nelson allait donc permettre aux services secrets de connaître à l’avance les projets d’assassinats de l’UDA.  Ce qui aurait dû empêcher en théorie de nombreux assassinats.  Selon les conclusions d’un des enquêteurs de l’enquête Stevens, il n’en fut rien[29].  Alors quel rôle pouvait bien jouer Nelson dans la lutte contre la violence politique?

Nelson, grâce à ses liens avec les services secrets, allait rapidement aider à la « professionnalisation » de l’UDA.  En 1987, à la demande d’un des chefs de l’UDA, il se rendra en Afrique du Sud afin de se procurer des armes.  Ce voyage fut fructueux puisqu’en janvier 1988, une importante quantité d’armes en provenance de l’Afrique du Sud se retrouvera entre les mains des différents groupes paramilitaires protestants[30].  Les services secrets avaient été tenus au courant de la mission de Nelson en Afrique du Sud.  Malgré tout, ils décidèrent de ne pas saisir les armes afin de protéger leur agent[31].  Ces nouvelles armes ne tarderont pas à faire sentir leur présence.  Au cours des six années qui précédent l’arrivée du convoi d’armes, les paramilitaires loyalistes avaient tué 71 personnes.  Ils en tueront 229 au cours des six années suivantes[32]

Nelson travailla aussi à la mise à jour des renseignements accumulés par l’UDA au fil des ans sur les individus soupçonnés d’appartenir au mouvement républicain.  Cette tâche fut accomplie grâce à l’aide de ses agents de liaison au sein de la FRU.  Nelson fournira les documents à ceux-ci, qui les éplucheront dans le but de détruire les documents concernant les individus décédés, ceux qui n’avaient aucun lien avec les républicains, et de compléter les renseignements sur les « cibles légitimes ».  De plus, il rencontrait régulièrement ses agents de liaison afin de les tenir au courant des individus qui étaient dans la mire de l’UDA.  Le nom de Finucane fut mentionné lors d’une de ces rencontres.  Nelson les mirent au courant que l’UDA voulait éliminer ce dernier et détenait les « preuves » de son appartenance à l’IRA.  Les agents de liaison ne tentèrent rien pour empêcher ce drame, même que l’un d’eux accompagna Nelson lors d’une opération de surveillance de la résidence des Finucane[33].  Les agents de la FRU ont donc laissé Nelson transmettre les renseignements concernant l’avocat aux tueurs de l’UDA tout en sachant le sort réservé à ce dernier.

La carrière de Nelson se terminera l’année suivante, alors que les enquêteurs travaillant pour le compte de l’Enquête Stevens retrouveront ses empreintes sur de nombreuses fiches d’identité sur des républicains retrouvées en possession de paramilitaires protestants.  L’arrestation de Nelson ne fut cependant pas une mince affaire pour les membres de l’Enquête Stevens.  Les agents de la FRU, voyant que l’étau se resserrait autour de Nelson, lui enseignèrent des techniques d’interrogatoire afin qu’il ne révèle aucun renseignement compromettant.  Le soir prévu de son arrestation, le local réservé à l’équipe de l’Enquête Stevens, situé dans l’édifice du quartier général de la police, fut la proie des flammes.  Ni le système d’alarme, ni le système téléphonique ne fonctionnaient à ce moment précis.  Malgré que l’enquête concernant ce feu conclut à la négligence d’un policier, les membres de l’Enquête Stevens affirment de leur côté, que l’incendie était d’origine criminelle.  Heureusement pour eux, les enquêteurs avaient pris l’habitude de conserver des doubles de leurs documents en lieu sûr depuis qu’ils avaient été mis au courant de la possibilité que leur local soit la cible d’un attentat[34].  Ce même soir, Nelson, informé de son arrestation imminente, fut transporté d’urgence en Angleterre.  Quelques jours plus tard, il sera rapatrié en Irlande du Nord et remis entre les mains des enquêteurs de l’équipe Stevens.  Malgré la gravité des accusations qui pesaient contre lui, Nelson sera condamné à seulement dix ans de prison.  Il fut libéré après six ans.  En avril 2003, une semaine avant la publication du troisième rapport Stevens, on apprenait que Nelson venait de mourir.  Selon différentes sources, Nelson, qui vivait depuis sa libération sous une nouvelle identité dans un lieu tenu secret, serait mort soit au Canada, soit en Floride, soit en Angleterre, soit au pays de Galles[35].  La confusion entourant l’annonce du décès de Nelson rend pour certains la mort même de Nelson suspecte.

            Billy Stobie a joué un rôle moins important que Brian Nelson dans l’assassinat de Patrick Finucane.  Toutefois, les renseignements qu’il a transmis à son agent de liaison avant et après le meurtre auraient dû empêcher le drame ou du moins conduire à l’arrestation des meurtriers.  Stobie était membre de l’UDA depuis le début des années 1970.  Au moment du meurtre de Finucane, il était devenu intendant de sa brigade.  À ce titre, il devait fournir les armes aux tueurs et les conserver en lieux sûrs et en bon état entre les attentats.  Depuis la fin de l’année 1987, Stobie menait une vie doublement dangereuse.  Il était devenu, non par choix mais par contrainte, agent double pour les services de renseignements de la RUC.  Comme plusieurs agents doubles en Irlande du Nord, il a été forcé de collaborer avec les forces de l’ordre sous peine d’être emprisonné pour sa participation à un meurtre.  En effet, Stobie avait été arrêté par la police à la suite de la confession d’un des tueurs d’Adam Lambert, un jeune protestant pris pour un catholique en raison de son accent.  La brigade à laquelle Stobie appartenait avait décidé de venger l’attentat meurtrier perpétré par l’IRA à Enneskillen, lors d’une cérémonie du jour du Souvenir.  Cet attentat avait fait 11 morts et 63 blessés, tous des civils.  L’UDA voulut faire payer un catholique pour ce massacre.  Adam Lambert fut le malheureux élu.  Après avoir appris la réelle identité de sa victime et étant la proie des remords, un des tueurs confessa son geste à la police.  Lors de cette confession, Stobie fut désigné comme étant celui qui avait fourni la voiture utilisée pour commettre l’assassinat.  Le chantage des services secrets de la police eut raison de Stobie et pour 20 £ par semaine, sans compter les bonus pour tout bon renseignement, il débuta sa carrière d’agent double.  Après l’assassinat de Patrick Finucane, Stobie, craignant pour sa sécurité, décida de raconter son histoire à un journaliste lui faisant promettre de garder secret le contenu de la conversation et de le publier uniquement s’il devait être arrêté.  Malheureusement pour Stobie, le journaliste en question, Neil Mulholland, ne respecta pas sa parole et transmit les renseignements obtenus à la police.  Ce geste entraîna l’arrestation de Stobie.  Ce dernier passa un mauvais quart d’heure au centre d’interrogatoire de Castlereagh.  Craignant que la police divulgue à l’UDA qu’il était un agent double, Stobie alla raconter son histoire à un autre journaliste.  Cette fois-ci, le journaliste en question, Ed Moloney, respecta sa parole.  Le contenu de la conversation sera publié en 1999, après l’arrestation de Stobie pour sa participation au meurtre de Patrick Finucane.  L’article de Moloney n’allait évidemment rien apprendre de nouveau aux forces de l’ordre.  Il allait par contre rendre publiques les agissements de la police nord-irlandaise et donner des munitions à la famille Finucane. 

Voici ce que Stobie révéla à Moloney.  Une semaine avant l’assassinat de Finucane, Stobie reçut l’ordre de son commandant de l’UDA de lui procurer des armes pour une opération qui devait être bientôt exécutée.  Son commandant lui confia que les armes allaient servir à l’élimination d’une tête dirigeante de l’IRA.  Sans savoir qui était la cible visée par l’UDA, Stobie téléphona à son contact au sein de la police nord-irlandaise pour lui faire part de la discussion qu’il venait d’avoir.  Le jour de l’attentat, Stobie se rendit à un pub pour remettre les armes à l’unité qui devait exécuter le boulot.  Une fois sur place, il constata que l’opération allait se dérouler dans la journée.  Tous les membres de l’unité, qui étaient tous réputés pour être de grands buveurs, étaient assis tranquillement un verre de coke à la main.  De retour chez lui, au alentour de 19h, Stobie téléphona à son contact afin de lui transmettre les derniers développements.  Malgré les renseignements fournis par Stobie, Finucane sera exécuté.  Son contact lui dira par la suite qu’ils n’ont pas eu suffisamment de temps pour s’organiser et de toute façon, la cible était un membre de l’IRA.  La police n’est pas intervenue par la suite non plus pour arrêter les coupables ou s’emparer des armes utilisées lors de l’attentat.  Pourtant Stobie avait bel et bien indiqué à son contact le nom des meurtriers et l’avait tenu au courant de tous les déplacements des armes après l’attentat.  La police récupérera les armes quelques mois après le meurtre, une fois seulement qu’elles n’étaient plus entre les mains des tueurs de Finucane[36].  Stobie sera arrêté de nouveau en 1999 par les membres de l’enquête Stevens.  Le procès de Stobie fut un vrai fiasco.  Ed Moloney refusa de transmettre ses notes à la cour, Neil Mulholland ne put témoigné en raison de troubles psychiatriques, et Stobie démontra que son travail à titre d’agent double aurait pu empêcher le drame.  Il sera acquitté de toutes les accusations portées contre lui.  Après son acquittement, malgré qu’il avait déjà été victime d’un attentat contre sa vie en 1994, Stobie décida de demeurer à Belfast dans son quartier protestant, croyant être en sécurité après avoir reçu l’assurance d’un chef de l’UDA que sa vie n’était pas en danger.  Il se trompait.  Le 12 décembre 2001, quelques semaines après son acquittement, Stobie fut abattu à bout portant vers 6 h 15 du matin alors qu’il sortait de chez lui.  Le meurtre fut revendiqué par les Red Hand Defenders (nom d’emprunt utilisé souvent par l’UDA/UFF lors d’attentat) pour trahison contre le mouvement loyaliste[37].  Stobie emportera de nombreux secrets dans sa tombe, mais pas celui de l’identité des tueurs de Finucane.

Les services secrets de police connaissaient l’implication de Ken Barrett dans le meurtre de Pat Finucane.  Pourtant Barrett ne sera jamais arrêté avant que les détectives attachés à l’Enquête Stevens n’en prennent connaissance.  Le journaliste John Ware, dans une émission réalisée pour le compte de la BBC, A Licence to Murder[38], a démontré, grâce au témoignage de Barrett, que l’ordre d’assassiner Patrick Finucane venait de la police nord-irlandaise.  Selon Barrett, quelques temps avant l’assassinat de Finucane, il fut présenté, par l’entremise d’un dirigeant de l’UDA, à un policier.  Celui-ci lui indiqua que Finucane était un haut gradé de l’IRA et qu’il s’occupait entres autres des finances de l’organisation.  Pour cette raison, il devait être éliminé.  Le policier lui promit que, s’il exécutait le contrat, il pourrait toujours compter sur lui en cas de besoin.  Pour réaliser le contrat, Barrett se tourna vers Brian Nelson.  Nelson lui fournira tous les renseignements utiles pour mener à bien le travail, dont une photo de la victime.  Une heure avant l’assassinat, Barrett reçut une confirmation de l’agent qu’il avait rencontré quelques jours plus tôt que les barrages policiers avaient été levés.  La voie était donc libre pour Barrett et ses acolytes.  Le 3 octobre 1991, Barrett, sûrement insatisfait de son sort, demanda à un sergent détective de le rencontrer.  Johnston Brown alla à la rencontre de Barrett qui lui offrit ses services à titre d’informateur.  Lors de cet entretien, Barrett avoua son rôle dans l’assassinat de Finucane.  Barrett stupéfia Brown en ajoutant qu’il n’y avait rien de nouveau pour la police dans cette déclaration et qu’il ne devait pas chercher à en savoir plus.  Brown l’apprit à ses dépends.  Il fut victime de menaces de la part de ses collègues.  De plus, l’enregistrement qu’il avait fait de sa rencontre avec Barrett fut détruite et remplacée par une autre conversation enregistrée avec Barrett, sans mention cette fois du meurtre de Finucane.  Barrett, avec l’aide de la police, évita donc la prison.  Après l’assassinat de Stobie, sachant bien que ses jours étaient comptés en raison de ce qu’il savait, Barrett s’enfuit en Angleterre.  Ne pouvant supporter sa nouvelle vie, il retourna quelques temps après en Irlande du Nord et accepta de se rendre à un des détectives en charge de l’enquête Stevens.  Barrett sans le moindre remords plaida coupable à l’accusation du meurtre de Patrick Finucane.

À la lumière de ces révélations, il est clair que seule une enquête publique et indépendante pourra satisfaire la famille Finucane.  Tout semble indiquer que le gouvernement britannique, par l’entremise de l’armée et de la police, a commandé et planifié le meurtre de Patrick Finucane et aidé les meurtriers à accomplir le méfait.  Cette enquête publique ne devra pas uniquement s’intéresser à ceux qui travaillaient sur le terrain.  Après tout, ils n’ont fait qu’obéir aux ordres et ne sont que des pions dans le système de collusion instauré en Irlande du Nord.  Cette « guerre sale » se décidait à des échelons beaucoup plus élevés de l’appareil décisionnel du gouvernement anglais.  C’est ce que devrait permettre de déterminer cette enquête.  On comprend dans ce contexte que le gouvernement britannique refuse toujours la tenue d’une enquête totalement publique et indépendante.  D’autant plus que le meurtre de Patrick Finucane, sans contredit le plus controversé et médiatisé du conflit nord-irlandais, n’est pas le seul dans ce sombre dossier de la collusion[39].  Un autre cas célèbre est celui de Rosemary Nelson. Cette avocate catholique connaîtra dix ans plus tard le même sort que Patrick Finucane.  Elle aussi fut victime d’intimidation et de menaces de mort de la part de membres de la RUC.  Malgré les plaintes officielles déposées à la Commission indépendante responsable d’examiner les plaintes formulées à l’endroit de la police, rien ne fut fait.  Le 15 mars 1999, Rosemary Nelson périra dans un attentat loyaliste à la voiture piégée[40].  L’enquête risque donc de révéler des faits troublants et d’incriminer des membres influents du gouvernement et des forces de l’ordre.  Malgré tout elle demeure essentielle pour établir les bases d’une paix solide et durable en Irlande du Nord.  La réconciliation est impossible tant que la vérité ne sera pas établie.  Pour reprendre les mots de Michael Finucane, un des fils de Patrick, la vérité cicatrise les blessures, le mensonge les infecte[41].





[1] Peter Taylor, Brits.  The War against the IRA, Londres, Bloomsbury PBK’s, 2002, pp. 286-7.

[2] Michael Finucane, The Force Research Unit They Killed my Father, The Guardian, 13 février 2001.

[3] Cour Européenne des Droits de l’Homme.  Jugement dans la cause Finucane contre le Rouyaume-Uni.  Strasbourg, 1er juillet 2003.
[4] Stevens Enquiry : Overview and Recommendations, 17 avril 2003, par John Stevens QPM, DL, commissaire de la police métropolitaine.
[5] Ed Moloney, Stevens has Known Finucane Killer’s identity for 5 years, Sunday Tribune.

[6] John Ware, The Guardian, 9 décembre 2003.

[7] Angelique Chrisafis, The Guardian, 17 septembre 2004.

[8] Rosie Cowan, The Guardian, 24 septembre 2004.

[9] Idid.
[10] Communiqué de presse de la famille Finucane, 2 novembre 2004.
[11] Communiqué de presse de la famille Finucane, 26 novembre 2004.
[12] The Guardian, 9 fébrier 2005

[13] Times, 14 avril 2005.

[14] 15 mars 2005.

[15] Bill Rolston, Unfinished Business.  State Killings and the Quest for TruthDublin, BPP, 2000, p. 175.

[16] The Killing of Pat Funicane.  Relative for Justice, 2003.

[17] Idid. 175.

[18] A Licence to Murder, Panorama, BBC-1, 19 juin 2002.

[19] La citation exacte de Hogg est la suivante : « I have to state as a fact, but with great regret, that there are in Northern Ireland a number of solicitors who are unduly sympathetic to the cause of the IRA ». Committee Stage Debate on the prevention of Terrorism (Temporary provisions) Bill, 17 January 1989.

[20] Ces « personnes qui s’occupaient de ces questions » étaient bien sûr des membres de la RUC.  The Guardian, 13 février 2001.

[21] Patrick Finucane’s Killing : Official Collusion and Cover-Up.  Amnistie Internationale.

[22] Paul Larkin, Avery British Jihad.  Collusion, conspiracy & Cover-up in Northern Ireland, Dublin, BTP, 2004, p. 39.

[23] British Intelligence : Brian Nelson and the Rearming of the Loyalists Death Squads.  Irish Northern Aid Committee, 1993.
[24] En 1976, Neave déclara « que l’armée et les forces de l’ordre devaient passer à l’offensive…et que le temps était venu pour écraser l’IRA. », Nicholas Davies, Ten-Thirty-Three, p.67.
[25] Ibid.
[26] Ibid.
[27] Selon les termes d’un document émanant de la FRU.  The Guardian, 13 février 2001.
[28] Outre Patrick Finucane, Terence McDaid et Gerald Slane seront assassinés en 1988, malgré qu’ils étaient aucunement impliqués dans les mouvements républicains, en raison de l’intervention de la FRU et de Brian Nelson.
[29] John Ware, op.cit.
[30] 200 AK 47, 90 pistolets Browning, 500 grenades à fragmentation, 30 000 cartouches et 12 lance-roquettes RPG 7.
[31] « An Appalling Vista » Collusion : British Military Intelligence and Brian Nelson, 1997.

[32] Ibid.

[33] John Ware, op. cit.

[34] Ibid.

[35] Belfast Telegraph, 3 septembre 2004.

[36] Ed Moloney, The Sunday Tribune, 27 juin 1999.

[37] RTE News, 7 décembre 2004.
[38] BBC, 19 et 26 juin 2002.
[39] À ce sujet voir le livre de Bill Rolston, op. cit.
[40] British Irish Right Watch, Justice Delayed…Février 2000, pp. 6-9.

[41] Micheal Finucane, Only Truth can heal, Mr. Blair.  Lies Fester, Sunday Business Post, 23 juin 2002.

2 commentaires:

  1. Hello Professor Poulin,

    I have been researching (as best I can) the 20th century politics in NI. I am not an Academic..just an American who's vision of Ireland was changed forever in the late 80's.

    I read a small article in my local newspaper. The article said "Irish children, both Catholic and Protestant were being sponsored by American families to come to America to stay with them for two weeks to get the children away from the "bombs and bullets."

    First, I didn't understand the religion comment and second.."what bombs and bullets?" I'm sure you know the idealized vision we Americans had of Ireland. A beautiful green Island in the north Atlantic, with leprechauns in the forests and fairies at the bottom of everyone's gardens.

    I didn't understand what the article was about..so I set off on the road to find out. The first years, I found it difficult to get much information. Then the Internet came along and I've read thousands of pages and watched hundreds of hours of video. I was totally appalled at the situation of the Irish people in NI.

    I've been reading Anthony and Carrie McIntyre's blogs from the beginning..first. "The Blanket" and now the Pensive Quill. I am so proud of their refusals to back down from their beliefs, even when Sinn Fein was doing their worst to them.

    Anyhow..I won't keep you. I just wanted to say hello and I will be checking on your blog from time to time. If you ever want to ask my opinions about NI..please contact me.

    My ancestors emigrated to Canada in the late 1600's. When the English made the Acadiens leave Canada in 1755,my branch of the Robillards moved down to Minn...Some moved down to New England and a lot to Louisiana. My group settled in the Yakima Valley in Wash..the whole valley was filled with the French Canadians. I have always rooted for Quebec to get independence! :)

    Happy St.Patrick's day.

    Lucy

    RépondreSupprimer
  2. Hi Sorry for this late late reply, I don't know why I mist you post. Sorry!

    RépondreSupprimer